Wayanad, au cœur des Ghâts occidentaux, dans le Kerala, est devenu un laboratoire à ciel ouvert du chaos climatique.
Autrefois sanctuaire de biodiversité, cette région luxuriante de forêts profondes, de collines ondoyantes et de plantations de thé est désormais au bord de l’ef-fondrement. Glissements de terrain meurtriers, moussons imprévisibles, sécheresses extrêmes, effondrement des récoltes: chaque année, des familles doivent fuir.
La déforestation, l’urbanisation anarchique et l’exploitation intensive des sols ont rompu les équilibres naturels. Les scientifiques identifient Wayanad comme l’un des principaux foyers de glissements de terrain en Inde. Pourtant, ce territoire reste largement absent des récits globaux sur la crise climatique. Le 30 juillet 2024, de violentes pluies ont déclenché une série de glissements de terrain dans le district de Wayanad, entraînant la mort d’au moins 392 per-sonnes, avec 150 autres portées disparues.
Il s’agit de la catastrophe naturelle la plus meurtrière de l’histoire récente du Kerala. Et ce drame n’était pas une exception. Des glissements de terrain s’y pro-duisent presque chaque année, amplifiés par des précipitations extrêmes liées au changement climatique. Malgré les alertes environnementales, des projets d’infrastructure continuent d’être lancés dans des zones à haut risque comme Wayanad, avec le soutien ou la validation des autorités, qu’elles soient locales ou centrales.
En refusant de freiner l’urbanisation dans des territoires écologiquement fragiles, le gouvernement porte une part de responsabilité dans l’aggravation des risques.La réponse reste trop souvent réactive, sans stratégie de long terme. Ici, la crise ne se mesure pas uniquement en chiffres, mais dans les corps qui résistent.Les femmes cueilleuses de thé avancent sur des sols instables.
Les paysans s’endettent pour replanter sur des terres incertaines.Et les familles déplacées s’accrochent à des bouts de colline, faute d’alternative. Wayanad n’est pas un cas à part. Il révèle un futur qui s’installe.Ici, le désastre ne précède pas les autres territoires, il les annonce.Ce que l’on refuse de voir ici, il faudra bien l’affronter ailleurs.

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